Premier contact souterrain || ft Gamon

Premier contact souterrain

Gamon & Mya

Marches. Plus vite. Les pas précipités semblent assourdissants aux oreilles de la jeune femme qui se faufile dans la foule telle une ombre. Ses yeux se posent sur chaque personne qui l’entoure, comme à la recherche d’une quelconque menace. Elle est tendue, mais essaye au mieux de paraître détachée. Se fondre dans la masse. Ça lui a plutôt bien réussi jusqu’à maintenant. Mais à cet instant, elle n’a qu’une envie, c’est être loin de tout ce monde. Et pour cause : elle a passé une bonne partie de son après-midi sous sa forme humaine. La fatigue l’assaille et des douleurs se font ressentir de part et d’autre. Il n’est pas bon de repousser ses limites. Pourtant, elle n’a aucune idée de ce qui lui arriverait si elle poussait le vice jusqu’au bout. Mais son instinct de survie lui déconseille franchement cette folie.

Après des minutes qui semblent interminables, un escalier descendu et elle aperçoit enfin l’entrée gelée. Mya s’arrête un instant, un regard d’horizon confirme qu’elle est seule. Plus que quelques minutes de marche et elle sera en sécurité. Partiellement en tout cas. Quand on est méta, on est en sécurité nul part.

La vision de la grotte sonne comme une délivrance. La méta enlève ses habits avec hâte. Quelques secondes et la jeune femme nue qui se tenait là un instant plus tôt est remplacé par une louve aux poils courts. Cette forme est bien plus confortable. Elle prend ses habits dans la gueule et va les cacher dans son coin habituel.

Quelques pas et la voilà désormais du côté où les Hommes ne peuvent passer, de l’autre côté de la barrière de glace. Mais la sécurité reste relative. Des sangs-purs vivent dans les sous-terrain. D’après les ragots, ils ne porteraient pas les métas dans leurs cœurs. Rejetés par les Hommes et par les Loups. Les méta vont avoir toutes les difficultés du monde à se faire une place.

Perdue dans ses pensées, elle se contente de marcher sans vraiment faire attention où ses pas la mènent. Habituellement, elle ne s’aventure pas vraiment dans les souterrains. Elle fait quelques repérages, cartographiant mentalement tous les endroits où elle va. Mais à cet instant, elle n’a absolument aucune idée d’où elle va. Par logique, il suffit de faire demi-tour et de retourner sur ses pas. Ce qu’elle fait sans pour autant vraiment reconnaître les lieux qui finalement, n’est pas différent d’un endroit à l’autre.

Ne cédant pas à la panique, Mya prend un instant pour fermer les yeux et réfléchir. Il lui suffit de faire confiance à son flair. Truffe au sol, elle parvient à retrouver sa trace. Soulagée, elle prend un instant pour s’asseoir et prendre une pause.

Un raclement de gorge annonce la présence de quelqu'un. A son odeur, un méta. Mya n'a jamais eu la chance de rencontrer un sang-pur, elle ne se méfie donc pas d'eux, malgré les rumeurs. Mais tomber sur un méta c'est bien aussi... Un peu angoissant à vrai dire. Que faire quand on se retrouve face à quelqu'un de son espèce ? Et s'ils avaient été proches mais qu'elle ne s'en souvient pas ?

Quand on perd la mémoire, que l'on ne se souvient pas de son passé, on a tendance à devenir un peu asocial. Comment se comporter avec les autres ? Il y a tant de codes, de bonnes manières, de règles de savoir vivre. Pour les humains, c'est facile. De longues heures d'observations et il n'y a aucune difficultés à agir comme eux...

Mya tourne la tête vers le nouveau venu, un loup noir à l'encolure teinté de roux.

« Bonjour. Es-tu... es-tu une méta? Il ne me semble pas t'avoir déjà... croisé? Que fais-tu si loin du groupe ? »

Il s'assoit, signe de paix. Logique. C'est important d'être solidaire dans une même race. N'est-ce pas ?

« Bonjour. Oui je suis une méta. J'ai perdu la mémoire après notre évasion du laboratoire. Je ne peux donc pas confirmer te connaître ou non, j'en suis désolé. Du coup...  »

Mya regarde ses pattes un peu honteuse de la confidence qu'elle va faire :

« Je ne sais pas trop comment agir avec les autres. Je ne sais plus en tout cas. Alors je me balade. En ville, les souterrains. J'essaye d'enregistrer un maximum d'informations. »

« Bombe le torse pour commencer, tu es une louve, tu es des nôtres et tu es en vie. Ne perd pas espoir, on retrouve tous un jour ce que l'on cherche! Si tu y mets du tiens, je suis sur que tu retrouveras des proches ou des loups qui te reconnaîtront! »

Mya relève la tête, pour le regarder s'approcher. Elle reste immobile, calme.

« Si il le faut, je t'aiderai. Nous devons nous entre-aider!  Je me nomme Gamon, te souviens-tu de ton nom? »

Mya sourit. Ce dénommé Gamon est altruiste. Ca ne tombe pas forcément sous le sens. Si la jeune méta n'en a pas le souvenir, les marques sur son corps, et les bavardages des autres de son espèce laissent entendre que leur passé dans les laboratoires n'était pas des plus confortables. C'est un euphémisme. Certains méta ont sans doute développé de la colère... Ça ne semble pas être le cas du méta au pelage noir qui est face à elle.

« C'est gentil de ta part. Mais je ne voudrais pas te faire perdre ton temps. Il y a beaucoup à faire. Nous devons trouver notre place entre les loups au sang pur et les humains... Je m'appelle Mya. Ton nom me dit vaguement quelque chose mais j'aurais très bien pu entendre les autres le prononcer.  »

Mya se concentre, des images s’immiscent dans son esprit. Comme lorsqu'elle rêve. Les images sont violentes, aveuglantes. Tels des flash d'appareil photo. La méta est comme aveuglée. Des tuyaux. Des gens en blouse blanche. Des loups. Gamon endormi sur une table. Un scalpel s'approche dangereusement du torse de la méta.

La méta sursaute, le coeur battant. Il lui faut quelques instants pour que sa respiration retrouve un rythme normal, que les battements de son cœur cesse de battre à la chamade.

« On s'est déjà vu. Dans le laboratoire. »

En prévision d'une futur question en approche, elle précise :

« J'ai des flash parfois. Surtout la nuit, dans mes rêves. Je revoie des images. »

C'est à cet instant qu'elle se rend compte qu'elle est debout, le poil hérissé. Elle a sans doute dû se lever lors son flash. Tentant de reprendre contenance, elle se rassied mais son poil reste raide.