We don't have to fight [ft Nilaya]

Arpentant les rues de la ville, Orwen avait entendu une rumeur selon laquelle des soldats seraient en pleine chasse aux loups dans la partie sud de la ville. Son père lui en avait vaguement parlé en venant chercher chez sa fille de quoi fabriquer des fléchettes tranquillisantes, censées assommer le loup pour quelques heures. Mais ce qu'il ignorait, c'est que la jeune femme n'avait pas fait des fléchettes tranquillisantes aussi efficaces qu'il ne l'espérait. Elle avait réduit les doses pour que le sommeil du loup ne dure que pendant son trajet jusqu'à la cage, où elle viendrait par elle-même le sauver. Elle savait que son plan était risqué, car les soldats auraient des armes, et elle, serait en face, à tenter de sauver l'espèce en danger. Le loup pouvait réagir violemment même si elle tentait de le sauver, elle s'en doutait bien, mais elle s'en moquait. Elle voulait mourir en sauvant sa cause, et si ça devait arriver, elle accepterait son destin. Elle avait attaché ses cheveux en deux longues nattes pour ne pas être gênée, avait enfilé une tenue noire de la tête aux pieds et n'avait pas oublié sa cape, mettant sa capuche sur sa tête pour plus de discrétion. Elle savait qu'elle était reconnaissable entre mille avec ses cheveux blancs, mais elle s'en moquait bien. Elle avait une idée en tête et ne comptait pas abandonner. Elle suivit donc de loin la troupe d'hommes de loin, se faisant le plus discrète possible, tentant de calmer sa respiration qui se voulait saccadée. Son cœur battait à mille à l'heure, et elle se posait bien trop de questions pour être en paix avec elle-même. Et s'ils allaient trouver le méta qu'elle avait croisé il y a quelques jours de ça ? Son cœur se serra, et fit une silencieuse prière à qui voudrait l'entendre pour sauver le loup auquel elle s'était rapidement attachée. Ils ne s'étaient vus qu'une fois, et il lui manquait déjà. Et puis, si John était parmi la troupe de soldats ? Son cœur se serra davantage, et elle pesta à voix haute, attirant l'attention de son père. D'un geste vif, elle se cacha derrière le mur le plus près et attendit de les entendre patrouiller à nouveau. Ils étaient déjà dans le quartier où ils devaient chasser, et ils commencèrent par se disperser. Grognant, elle les laissa faire, et s'assit contre le mur en attendant, non loin de là où la cage attendait. Elle commença alors par préparer d'autres fléchettes tranquillisantes cachées dans sa cape, et attendit ainsi que le loup ne revienne dans les mains dans hommes. Elle parvint même à s'assoupir, jusqu'à ce que des soldats n'arrivent en courant, visiblement heureux de leur trouvailles. Se penchant légèrement en avant, elle observa la bête endormie. Elle se mit alors à trembler, et plaqua une main sur sa bouche pour ne pas hurler. Il était noir, et un instant, elle crut que c'était lui. Mais sa raison lui souffla qu'il était trop petit pour être lui, et son cœur qu'elle devait déguerpir. Mais elle resta là, les regardant mettre le monstre en cage. Une fois fait, deux des hommes s'étirèrent avant de proposer : « Faut que j'aille pisser. » Trois d'entre eux partirent donc plus loin pour régler leurs petites affaires et faire leur ronde, tandis que son père et un autre garde attendirent en débattant sur ce qu'ils pouvaient bien faire à cet animal sans défense. N'ayant pas beaucoup le temps d'agir, Orwen sortit sa petite sarbacane et envoya deux flèches dans le cou de ces hommes, avant de s'approcher discrètement en regardant autour d'elle. Elle fouilla les poches du soldat pour récupérer et ouvrir la cage, avant de venir planter sa manque dans la peau du loup pour vérifier qu'il n'était pas mort. Un cri de surprise traversa le seuil de ses lèvres quand elle le vit ouvrir les yeux, et elle se jeta en arrière, envoyant les clés plus loin. Son cœur se mit à battre la chamade, de peur que les autres l'aient entendue et ne veuillent l'enfermer à son tour.

Elle n'avait pas prévu que la bête se réveille aussi tôt. Elle aurait préféré qu'elle reste endormie encore un peu le temps de laisser la cage ouverte et de s'éloigner pour éviter le danger. Mais le danger était bel et bien présent, soufflé par une voix dans sa tête qui lui hurlait de courir. Mais il y avait aussi l'autre voix, fascinée par ce qu'elle voyait, lui disait qu'elle devrait rester là pour observer la bête. Assise ainsi sur le sol, en position de faiblesse, elle regardait donc son pelage noir dans lequel elle venait de plonger sa main, puis ses yeux d'un bleu tellement puissant qu'elle était certaine qu'il pouvait hypnotiser n'importe qui. Comment avaient-ils pu l'attraper alors qu'elle ne faisait peut-être rien de mal ? Elle détourna un instant le regard brumeux qu'elle arborait vers son père, allongé au sol, qui se réveillerait bientôt, puis vers la direction qu'avaient pris les soldats priant pour qu'ils ne reviennent pas de si tôt. Elle songeait même déjà que c'était la fin et elle laissa couler une larme sur sa joue, laissant tomber sa capuche sur ses épaules pour dévoiler son visage qui serait probablement bientôt défiguré. Comment réagirait son père s'il apprenait que c'était elle qui les avait assommés pour sauver un loup qui l'avait ensuite mangé ? Et sa mère, qui portait tous ses espoirs en elle ? Et Gamon, à qui elle s'était lâchement attachée, alors qu'elle savait pertinemment que cette relation entre un loup et une humaine ne pourrait pas passer inaperçue très longtemps. Avaient-ils déjà envahi sa maison en sachant qu'un loup y avait laissé ses traces ? Déglutissant, elle finit par regarder la louve en face, le cœur tambourinant dans sa poitrine, menaçant d'exploser. Et puis, le temps s'arrêta soudain lorsque les grognements de la bête vinrent lui sonner à l'oreille, lui faisant comprendre ce qu'elle voulait dire. Clignant des yeux à plusieurs reprises, elle l'observait avancer vers elle, impuissante. Elle venait de comprendre aussi clairement que si c'était un autre humain qui lui parlait. « Tu as dit quoi ? » demanda-t-elle en fronçant les sourcils, avant de placer sa main devant elle de manière défensive, même si ça ne l'empêcherait pas de le lui arracher. Déglutissant, elle décida alors de converser, à moins que tout cela ne soit que le fruit de son imagination trop débordante, et de sa naïveté habituelle. « Arrête ! J'te toucherais plus, je le jure. » Elle commença alors à prendre appui sur ses jambes pour reculer avec prudence, avant de se remettre sur ses jambes, juste au cas où. Il lui restait deux fléchettes tranquillisantes dans la poche. Si elle en utilisait une sur le loup, elle aurait de quoi en utilise une sur un des soldats revenant sur leurs pas, mais il en resterait un, qui ne resterait pas de marbre. Elle pouvait aussi les utiliser sur les deux gardes revenants, mais dans ce cas là, le risque était de tous mourir sous les dents de cette louve. Dans tous les cas, elle savait bien que sa vie était foutue, et qu'elle regrettait de ne pas avoir été au bout de ses pensées. La voix tremblante, les mains moites, elle reprit alors, espérant qu'elle puisse comprendre et ne pas la manger tout de suite. « Je suis là pour t'aider à retourner avec les tiens. » Encore fallait-il qu'elle la croit, et qu'elle veuille bien lui faire confiance, ne serait-ce que pour quelques minutes.